Deux articles établissent le lien entre développement in utero, inflammation, microbiote et autisme

Depuis les travaux classiques du regretté Paul Patterson, on sait que l’activation du système immunitaire pendant la période intra-uterine produit un syndrome de type autistique en activant le système immunitaire et causant la libération de molécules d’inflammation type interleukines qui elles impactent la maturation cérébrale. On sait aussi que chez les rongeurs comme chez les primates non humains, il y a des malformations corticales suggérant des désordres migratoires –qui sont d’ailleurs la cause de très nombreuses formes d’épilepsie infantile. Ces malformations qui ont été observées aussi chez des patients autistes sont visiblement la cause du syndrome. Leur ampleur indique qu’il y a une déficience dans la prolifération cellulaire pendant la période intra-utérine et que ces patches de cellules aberrantes jouent un rôle important dans les manifestations de l’autisme. Reste que les liens entre ces neurones déplacés et le fonctionnement des réseaux neuronaux et du comportement sont restés de type corrélatif plutôt que contraignant. Deux articles récents d’un même groupe, effectués sur des souris et publiés par Nature, apportent des données directes et contraignantes sur les points suivants :

i) pendant la grossesse (et pas après), une inflammation produite par l’activation précoce du système immunitaire, qui mime une infection importante pendant la grossesse (deuxième trimestre), va générer des effets délétères sur les nouveaux-nés, mimant un comportement de type autistique. Cette inflammation est médiée par l’activation de molécules d’inflammation identifiée ici comme étant l’Interleukine 17a. `

ii) cette inflammation et la formation d’agrégats de cellules déplacés nécessite aussi l’infection de cellules du système macrobiotique -c’est la convergence des actions au niveau intestinal et central qui va causer les syndromes autistique. Des antibiotiques ou autres manipulations qui empêchent le processus bactérien inflammatoire in utero atténuent aussi le syndrome autistique. Il faut souligner que cela ne concerne que la période de la grossesse et une période précise dans ce travail, on ne peut pas en déduire que les antibiotiques ont une action bénéfique quelconque plus tard.

iii) des amas de cellules dans des régions du cortex, ici identifiées pour la première fois de façon directe et contraignante, jouent un rôle dans les manifestation délétères car l’activation de ces régions produit le syndrome et l’inhibition de l’activité de ces régions les inhibe. En d’autres termes, ces réseaux aberrants formés in utero à cause de l’inflammation persistent chez l’adulte et sont la cause du syndrome.

En résumé, il s’agit de la démonstration d’une triple relation entre microbiote, cortex, grossesse et pathogenèse de l’autisme. On ne comprendra pas et donc on ne traitera pas l’autisme sans comprendre comment les malformations sont induites in utéro. Ce travail s’inscrit fortement dans la lignée de travaux qui suggèrent, en accord avec le concept de Neuroarchéologie que j’ai proposé, que nombre de maladies et notamment l’autisme naissent in utéro. Les causes initiales de la pathologie -qu’elles soient génétiques ou environnementales- produisent leurs séquelles délétères en modifiant le processus de construction du cerveau en formant des réseaux aberrants qui empêchent le fonctionnement des ensembles neuronaux essentiels pour l’intégration et la communication. Ce sont ces malformations qu’il faut essayer de traiter et non la cause initiale (la mutation) car le diagnostic intervient bien après la grossesse et la découverte de nouvelles mutations génétique ne changera pas cette situation. Il est essentiel de s’investir plus dans la compréhension du phénomène maturatif et de sa déviation par des évènements pathogènes. Si ces articles n’ont pas d’implications cliniques immédiates sachant l’impossibilité à diagnostiquer l’autisme tôt (et a fortiori in utéro), elles s’inscrivent dans une perspective de développement de traitements qui bloquent ces activités aberrantes de façon sélective. C’est ce que nous faisons avec la phase 3 d’un large essai clinique approuvé par les autorités Européennes et basé sur le blocage sélectif d’activités produites par des réseaux neuronaux aberrants. Nous espérons que ces articles comme de nombreux autres contribueront à l’investissement plus fortement dans la physiologie et la pathophysiologie du développement cérébral.

Kim et al. Maternal gut bacteria promote neurodevelopmental abnormalities in mouse offspring ; Nature, septembre 2017, sous presse

Yim et al. Reversing behavioural abnormalities in mice exposed to maternal inflammation, Nature, septembre 2017, sous presse

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