Bruining et ses collègues montrent dans un essai mono-centrique de 3 mois sur 92 enfants (7-15 ans) possédant le langage et un QI> 50 et sans retard mental que la bumétanide n’atténue pas le syndrome. Ce résultat diffère de 5 essais mono ou multicentriques effectués par 3 structures indépendantes avec des améliorations significatives produites par la bumétanide. De plus, ce même groupe a montré récemment que la bumétanide atténue les traits autistiques chez des enfants atteints de la Tubéreuse de Bourneville. Les auteurs suggèrent que la bumétanide pourrait n’être efficace que sur certains enfants.
Des échecs d’essais sont fréquents surtout s’agissant de syndromes hétérogènes comme l’autisme. De nombreuses explications sont possibles et notamment la sélection restreinte et inappropriée de la population incluse dans l’essai, les interventions parallèles de mesure d’EEG (ÉléctroEncéphaloGramme) et de tests cognitifs qui peuvent augmenter les réponses placébo et le fait qu’il s’agit d’un essai mono-centrique qui augmente les biais d’évaluation en comparaison d’un essai multi-centrique. Cet ensemble de raisons expliquent probablement les taux élevés de valeurs placébo qui du coup réduisent de façon significative la probabilité de déceler une efficacité au traitement.
La conclusion des auteurs de cet essai qui a échoué sans être négative est que la bumétanide ne sera pas efficace dans des essais réunissant de large cohortes de patients hétérogènes, ce qui au demeurant est contredit par les 5 essais positifs effectués sur une population nettement plus représentative de la population. Bruining conteste la possibilité qu’un seul traitement puisse atténuer l’autisme avec son hétérogénéité. Bien entendu, nous ne nous attendons pas à avoir un traitement miracle de tous les autistes comme d’ailleurs les autres atteintes impliquant le cerveau ! Cela étant, des atténuations significatives ont été observées dans des essais précédents couvrant un large spectre d’enfants (2-18 ans) avec des sévérité légères & sévères. Par conséquent, même s’il s’avérait que des essais sur une population très restreinte et sélectionnée-se basant sur l’EEG ou d’autres biomarkers- serait plus efficace que de larges essais sur une population plus représentative, nous ne pensons pas que laisser sur le carreau, des enfants qui n’entrent pas dans ce cadre et qui sont gravement atteints est une option.
En résumé, restreindre un traitement à une sous population, non-représentative des enfants ayant un syndrome autistique ne nous semble pas la meilleure façon de prendre en compte l’hétérogénéité de l’autisme. Nous espérons que les 2 larges essais de type phase 3 conduites en ce moment par l’entreprise pharmaceutique française Servier avec Neurochlore (400 enfants dans 40 centres couvrant une large population hétérogène) aboutira à une mise sur le marché du premier traitement tant attendu par les enfants et les parents. Ces larges essais permettront aussi de mieux comprendre les paramètres les plus atténués par le traitement et les mécanismes sous-jacents. Nous espérons qu’ils vont valider notre proposition d’utiliser la bumetanide dans le traitement de l’autisme née il y a bientôt 10 ans.
Y. Ben-Ari, CEO Neurochlore
Neuroscientifique, Directeur Emérite INSERM, Grand prix INSERM et des fondations Américaines et Européennes de l’épilepsie